Mon fils est à gaza depuis 20 jours.

Depuis 20 jours, j'apprends à découvrir mon cœur.

C’est étrange. 

Je vis avec lui depuis si longtemps, on se côtoie, on se ressent, on échange et pourtant ... Je le découvre à peine maintenant.

Je le connaissais si peu.

Je le savais vif et vital.

Je le savais central.

Mais je ne connaissais rien de lui.

Je découvre tous les jours un peu plus de ce qu'il contient.

Je découvre tout d'abord cette immense place qu'il occupe dans mon corps.

Je ne suis plus qu'un cœur qui bat.

C’est comme si mon corps n'était plus qu'un cœur ...je le ressens partout et tout le temps.

Lui qui battait discrètement, dans son coin, il n'est plus ce qu'il était ; il m'envahit littéralement.

Il bat.

Si vite.

Si douloureusement.

Je décide alors de dialoguer avec lui pour le comprendre, pour le saisir.

Et voici notre dialogue, 

Un dialogue surréaliste entre une mère et son cœur qui bat ou peut être ...peut être ...entre une mère et son fils - son cœur - qui SE BAT ! 

-  je te ressens bien plus qu'avant. Pourquoi es-tu si présent ?

-  je suis vital, me répond le cœur, je ne fais que mon travail et parfois, tu as encore plus besoin de moi.

Sans ces battements, rien ne survivrait ... Sans eux, rien ne serait. 

- dis-moi, pourquoi je te ressens si fort en ce moment ? Pourquoi bats-tu si vite et puissamment ? 

- parce que tu penses beaucoup à ce qui compte le plus pour toi ; et quand tu penses à ceux que tu aimes, alors moi, ton cœur, je m’emballe comme pour te montrer que ceux qui t'aiment sont là, pas loin.

- tu sais, il m'arrive de sentir que tu pèses une tonne, durant ces moments j'ai le cœur si lourd ...j’ai même l'impression de ne plus pouvoir te contenir, qu'il n'y a plus de frontières, que tu es quelque part, je ne sais où.

- oui, des fois le poids est immense et je sens bien que la charge est lourde, que j'ai beaucoup à faire, mais je dois rester fort, je ne peux faiblir car vous dépendez tous de moi ! Et j'ai confiance en toi qui sauras contenir tout ce poids. Et moi, je trouverai en toi la force de continuer mon rôle si primordial dans le monde ! 

- il m'arrive si souvent de ressentir comme un creux, une faille en plein cœur, je faiblis, je te sens alors battre très très vite et mon corps tremble tout entier, je m'affole, je sombre ...

Alors je prends mes deux mains et je les pose fort sur toi comme pour me rassurer que tu es toujours là, en moi, et que bientôt, oui bientôt, tu battras à nouveau, tranquillement et sereinement ...

- tu sais, je la sens si souvent cette main que tu poses sur moi. Et moi, ton cœur, je sens aussi tes larmes qui coulent à flot le long de tes joues, de tes mains ....je t'entends murmurer aussi de nombreuses prières ....et je (me) bats au rythme de tes larmes et de tes mots .

Ces mots me rendent forts et tes maux expriment ton amour.

N'oublie pas : 

Le cœur est le symbole de la vie, je (me) bats pour elle. 

- je ne te savais pas si capable, si courageux, je te connaissais si peu …je découvre un cœur si intense et si complexe.

Et puis, il m'arrive également d'essayer de te mettre en " silencieux " pour pleurer moins, pour protéger les enfants. Mais tu es là ...en permanence, alors je te demande seulement : s'il te plaît, ne (te) bats pas trop fort ! 

- je ne suis jamais vraiment en silencieux tu sais ...un peu pendant les heures de sommeil mais, même là, une part de moi reste éveillée, cette même part qui continue de (se) battre inlassablement pour que la vie continue.

 - Mon cœur, je sens que tu as des forces et des ressources infinies.

Tu es à ta place, cette place si centrale. 

Tu es au cœur de l'existence, tu es ce qui nous permet D’ETRE ! 

Et tu remplis ta fonction à merveille, car je te sens en moi très fort ! 

- moi aussi, maman, je te sens en moi très fort, tes mots me portent. Je sens ta main, je sens tes larmes, je sens tes mots.

Je serai bientôt là bzH, et ton cœur pourra à nouveau battre tranquillement .....

Mariacha Drai.